Le 17 septembre prochain aura lieu à Nantes pour la première fois une nouvelle édition du Forum Smart City en partenariat avec La Tribune et le Forum international Live in a Living City. Notre ambition est de conférer à ce Forum un rayonnement international pour construire ensemble, à la lumière d’échanges fructueux et de partages de bonnes pratiques, une ville de demain à la fois humaine, citoyenne, solidaire, connectée et ouverte.

Si toutes les grandes métropoles du monde doivent aujourd’hui faire face à des problématiques communes, il n’en demeure pas moins vrai – et je ne cesse de le réaffirmer sur la scène internationale – que chaque ville est unique, porteuse d’une identité, d’une culture, d’une mémoire qui s’incarnent dans ses infrastructures comme dans sa population. Il est essentiel pour toutes les villes de réussir leur transition urbaine, c’est-à-dire de relever les défis à la fois environnementaux, sociaux, culturels, économiques et de résilience auxquels nous devons faire face au XXIème siècle, pour devenir des smart cities humaines, qui placent le citoyen au centre de leur organisation. Mais chaque ville doit parcourir un chemin qui lui est propre pour y parvenir, et c’est ce qui rend la problématique du devenir urbain mondial si passionnant.

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Nantes est une ville à la personnalité forte, qui s’affirme de plus en plus ces dernières années du fait des choix stratégiques assumés par sa gouvernance. Elle se situe au carrefour de deux influences : celle de sa façade atlantique, qui lui confère son identité de ville portuaire – ville ouverte sur le monde, ville d’échanges commerciaux, ville de marins et d’amoureux de la mer également. Avec un trafic extérieur annuel d’environ 27 millions de tonnes, Nantes Saint-Nazaire est ainsi le premier port de la façade atlantique française et le 4ème Grand Port Maritime français. Mais Nantes est aussi une ville du fleuve, des terres intérieures façonnées par les méandres ou boires, ces bras morts qui sont aujourd’hui des réserves naturelles particulièrement riches en biodiversité. Plus long fleuve de France, la Loire est encore considérée comme une entité écologique exceptionnelle : c’est le dernier grand fleuve relativement « sauvage » de France. Puissance de l’océan, douceur du fleuve, Nantes porte donc en elle ces deux tempéraments contraires.

Ses liens avec la mer et le fleuve en font une ville fondamentalement ouverte vers l’extérieur : Nantes, c’est la ville du voyage. Voyages extraordinaires de Jules Verne, voyages imaginaires de la compagnie Royal Deluxe, voyages mécaniques des formidables machines de l’île de Nantes… Cette aspiration à la découverte et à l’altérité, qui fait sans aucun doute partie de sa culture depuis des décennies, a façonné la ville que nous connaissons aujourd’hui, bluffante d’originalité, de vitalité, de créativité. Elle a réussi là une belle reconversion, suite à la fermeture, en 1987, des chantiers de l’Atlantique qui mit fin à la grande tradition industrielle de la ville. Création du Lieu Unique, réhabilitation des Halles Alstom, création de la Folle Journée, réhabilitation du château des ducs de Bretagne… le déploiement de la stratégie de reconversion orchestrée par la gouvernance s’est rapidement traduit par de belles réussites.

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Nantes avait donc de belles prédispositions, semble-t-il, pour réussir également sa transition urbaine ! Elle mène en ce sens une politique extrêmement proactive, emmenée par sa maire et une équipe dynamique bien décidés à ne pas se laisser enfermer dans les clichés, les mantras ou les dogmes. Sur le plan environnemental, la ville s’est engagée très tôt dans des actions de fond. Elle a d’ailleurs accueilli en juin dernier le sommet mondial du vélo urbain VeloCity, et s’est reconvertie à cette occasion en capitale mondiale du vélo avec de nombreux événements promus par la municipalité. Le sommet mondial de la ville durable Ecocity s’est également tenu à Nantes en 2013. Sur le plan de la mobilité également, la municipalité a mis en œuvre des mesures plus adaptées aux besoins des habitants, avec, notamment, des horaires aménagés. Enfin, l’équipe municipale travaille au quotidien à faire émerger les « villes invisibles » d’Italo Calvino, celles de la misère, de l’exclusion, de la discrimination.

Le projet de réaménagement de l’Île de Nantes est lui aussi tout à fait exemplaire, que ce soit en termes d’habitat social, de mixité des usages ou de construction durable. Rappelons que 51 ha d’espaces publics ont déjà été créés ou retraités, 4400 nouveaux logements réalisés, dont 23% de logements sociaux, plus de 230 000 m2 de bureaux et 100 000 m2 d’équipements créés. D’ici 2030, d’autres aménagements de taille sont prévus. Le projet prévoit en outre d’unifier, de connecter les différents quartiers de l’île par une trame paysagère qui abritera des pistes cyclables, des espaces de jeux, de larges cheminements piétonniers… J’ai pour ma part été tout à fait impressionné par la dimension et l’ambition de ce projet qui devrait inspirer nombre de villes dans le monde.

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L’école de design de la Ville de Nantes promeut quant à elle énergiquement, à l’échelle du territoire, le design des services, qui place l’usager au centre de son approche, révolutionnant nos vieilles manières de fabriquer, bâtir et concevoir. Belle manifestation de cette dynamique créative, la French Tech nantaise est l’une des plus actives de France. Elle fait circuler des idées originales dans la région, comme la création d’un billet SNCF gratuit pour les entrepreneurs de la French Tech, au même titre que les billets militaires autrefois. Citons également l’école de la deuxième chance, l’Institut de Recherche Technologique Jules Verne, le créatif et original lieu d’échanges, d’expériences et de vie AIR38, le compostage urbain et collaboratif au cœur des cités… autant d’initiatives qui font de Nantes un formidable living lab, laboratoire à ciel ouvert et une expérience créative à part entière.

Il faut sans doute rappeler pour conclure que des défis demeurent néanmoins, en priorité la lutte contre les inégalités économiques, sociales, culturelles, numériques. La ville doit aussi, à mon avis, devenir plus visible sur la scène internationale, pour y mettre en avant ses bonnes pratiques et aller vers des projets plus poussés en coopération.

Le 17 septembre prochain, aux côtés d’autres experts de la ville vivante de demain, nous poursuivrons donc la réflexion « humaniste » entamée autour de la ville intelligente, qui a permis de recentrer le débat sur l’essentiel : les citoyens, et qui a changé la donne sur le sujet grâce à l’implication de tous les acteurs concernés. L’enjeu majeur de notre approche est en effet la capacité à créer des usages et des services qui contribuent à l’amélioration de la qualité de vie, qui apportent des réponses aux besoins des habitants. C’est la raison pour laquelle je parle sur la scène nationale et internationale de « smart city » humaine ou de ville vivante. Nantes en est un magnifique exemple.